Le projet controversé de Center Parcs à Roybon est abandonné

Publié le par Christophe Palierse pour Les Echos

Interview de Gérard Brémond, président de Pierre & Vacances, le jour même où le groupe annonce l'abandon du projet du Center Parcs de Roybon.

Il est question de Roybon, de tourisme responsable et de proximité, d'écologie positive, de lutte contre le réchauffement climatique et le surtourisme, mais aussi de maillage du territoire et de tous les autres projets Center Parcs en cours...

Le projet controversé de Center Parcs à Roybon est abandonné

Après dix ans de contentieux, le groupe Pierre & Vacances Center Parcs renonce à réaliser son projet dans l'Isère. Son président-fondateur, Gérard Brémond, estime pourtant le concept plus que jamais dans l'air du temps. Il confirme la poursuite de son développement en France et en Europe.

 

Pourquoi abandonnez-vous le projet de Center Parcs de Roybon ? Est-ce la résultante d'une impasse juridique ou d'une vague verte montante ?

Cela n'a rien à voir avec la vague verte. Nous abandonnons le projet parce qu'il nous aurait fallu déposer une nouvelle autorisation de défrichement du site et faire, au préalable, une étude d'impact dite de « quatre saisons » sans intervention possible sur le terrain en raison de son occupation illégale. Notre autorisation actuelle, délivrée en 2010, deviendra caduque le 12 juillet. Ce projet s'est transformé en course à l'échalote administrative et judiciaire sans fin. Il est sous les projecteurs depuis 13 ans !

Comment expliquez-vous une telle cristallisation, alors que vous avez développé d'autres projets de Center Parcs en France ?

Il y a eu, je crois, un concours de circonstances. Roybon s'est ajouté aux affaires du barrage de Sivens et du projet d'aéroport de Notre-Dame-des-Landes. Cela ne veut pour autant pas dire que l'on ne peut rien faire en France. Nous avons poursuivi notre développement avec la réalisation du Center Parcs de la Vienne, l'extension de celui de la Moselle, et lancé celui du Lot-et-Garonne qui ouvrira au printemps 2022. Le cas Roybon est d'ailleurs paradoxal car partout en Europe, et en France aussi, Center Parcs est considéré comme une référence en matière de tourisme responsable. C'est d'ailleurs l'ADN du groupe depuis la création d'Avoriaz.

Qu'est-ce qui a bloqué ?

Nous avions un beau projet, élaboré avec le plein soutien des collectivités territoriales, de la population locale, et de l'administration. Nous cherchions un site au sud de la Loire dans le cadre d'une stratégie de maillage du territoire. Le site de Roybon nous est apparu approprié. Il n'était pas référencé Natura 2000.Il s'agissait d'une forêt de coupe. Notre projet, qui intégrait en 2007 les derniers ingrédients en matière de développement durable, ne portait que sur 0,42 % de l'ensemble du massif forestier. Et puis les oppositions se sont radicalisées à partir de 2010. Nous avons basculé dans un marathon judiciaire quand bien même le Conseil d’État a validé les permis de construire. Un jugement a même considéré Roybon comme un projet d'intérêt public majeur. L'aboutissement est triste car les conséquences sont surtout lourdes pour la région en quête d'emplois et de développement économique. Nous devons voir avec la commune ce que nous ferons du site qui nous appartient. Nous réfléchissons à plusieurs options. Ce qui est sûr, c'est que nous n'en ferons pas une destination touristique avec hébergements...

Compte tenu du contexte sociétal et politique, n'êtes-vous pas contraint à rehausser vos standards ?

Je suis plein d'espoirs à propos des Verts. La preuve que je ne suis pas rancunier ! Leur arrivée aux responsabilités est une très bonne chose. Il faut passer d'une écologie négative à une écologie positive. Le dossier Roybon pose aussi la question de la longueur des procédures, de la stabilisation des normes. Nous l'avons bâti en 2007 sur une certaine définition des zones humides. Elle a changé par la suite, ce qui nous place in fine dans une insécurité juridique. Plus largement, nous avons collectivement deux enjeux à relever : la lutte contre le réchauffement climatique et le surtourisme. Nous nous rejoignons avec les écologistes sur la question de l'aménagement du territoire. Nous avons en France 80 % des flux touristiques sur 20 % du territoire. La situation va être catastrophique si nous accueillons un jour 100 millions de touristes sur ces 20 %. Il faut donc aménager des zones actuellement délaissées. Tous les grands pays touristiques, tels l'Espagne et le Maroc, ont un plan global incluant notamment les infrastructures et la fiscalité, pas nous. Nous accumulons les mesures mais il n'y a pas d'approche globale.

Quel est votre programme de développement pour Center Parcs ?

Center Parcs continue à se développer en Europe et, en premier lieu, en Allemagne, notre pays prioritaire. Nous y avons deux projets très avancés, l'un dans le nord du pays, l'autre en Bavière, et deux autres en gestation, près de Berlin et dans l'ouest de l'Allemagne. Nous avons 3 projets en Scandinavie, notamment au Danemark, où un premier site est en cours de développement sur la mer Baltique. S'agissant de la France, nous ne renonçons pas, en dépit de l'abandon du projet de Roybon, à une implantation dans la région lyonnaise. Par ailleurs, nous avons toujours des projets en Chine​.

Center Parcs correspond aux attentes des consommateurs. Nous avons d'ailleurs une bonne activité sur la saison d'été. Elle devrait être proche de celle de l'an dernier. Plus les sites ont rouvert tôt, meilleure est l'activité. Aux Pays-Bas, les premiers à rouvrir, le taux d'occupation est supérieur à celui de l'été 2019. A contrario, en Belgique, où nous avons ouvert fin juin, nous sommes légèrement en retard.

Cela confirme un repli des vacanciers cette année sur leur pays respectif ?

C'est vrai. Ce rebond immédiat est néanmoins très encourageant. Nous observons la même tendance pour la marque Pierre & Vacances. La montagne, l'été, est une destination d'avenir.

Au-delà du choc économique, quelles sont les incidences de la crise sanitaire ?

C'est un facteur d'accélération des tendances existantes : le tourisme de proximité, la quête de la nature, la nécessité de lutter contre le surtourisme. De nouveaux réflexes sanitaires vont s'inscrire dans la durée. S'agissant de la politique touristique, le gouvernement Philippe a posé les jalons d'un plan de développement du tourisme français avec la mobilisation financière du groupe Caisse des Dépôts.

Vous pouvez retrouver l'interview complète en suivant le lien ci-dessous :

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